mercredi 24 avril 2013

De l'Art d'être une parfaite rebound girl


Si ce texte était le scénario d'une série américaine débile, la voix off dirait certainement : "some girls are real girlfriend material, some girls are just rebound girl material. I might be in the second category."



La rebound girl se laisse séduire lors d'une soirée trop alcoolisée par le charme énigmatique de cet américain rencontré opportunément, alors qu'elle essayait peut-être d'échapper à d'autres bras inconnus. Rapidement ce sont ses bras à lui qui enserrent son accueillante taille, puis ses mots, prononcés dans un demi-sourire.
Elle sait bien qu'il utilise probablement chaque soir les mêmes phrases avec les mêmes filles pour avancer vers les mêmes artificieux desseins... Mais l'alcool ou la solitude brouillent ses jugements et elle rit. Elle se demande depuis combien de temps la sincérité avait abandonné ses éclats.
Sans vraiment comprendre, la voilà à l'arrière d'un taxi. Les rues résidentielles endormies de Pékin filent sous son regard embué par l'alcool. Elle pose la tête sur ses genoux et tend l'oreille à ses confidences. Peut-être est-ce la douceur de son regard à elle qui attire inévitablement l'abandon de ses interlocuteurs... Ou sa façon d'écouter.
Il l'a rencontrée il y a des années. Il y a près de cinq ans qu'elle l'a quitté, il l'aime encore et ça le rend fou.
La rebound girl a le cœur qui se serre. Elle voudrait quitter ce taxi et s'enfuir mais elle tente plutôt de négocier avec elle-même. Profite de l'instant avec détachement ! Laisse un soir, un seul, tes ennuyeuses élucubrations et ta déraisonnable fierté ! D'ailleurs, depuis toujours, la jalousie est un sentiment qu'elle trouve bas, avilissant, écœurant. Alors elle décide de s'oublier pour une nuit.
Mais sur un malentendu, une étourderie au moment du départ, un lapsus, une erreur vraiment, la nuit devient des nuits, la semaine se transforme en mois, et la rebound girl s'embourbe autant qu'elle peut dans un déni qui l'épuise.
Plus tard, il lui montrera la photo d'une américaine vulgaire, aux traits presque laids mais au corps sans défauts, et voilà, elle souffrira tout à fait. Elle aura l'impression d'aimer parce qu'elle sera malheureuse.

La rebound girl n'a jamais assez confiance en elle pour partir, elle n'est jamais assez patiente pour attendre paisiblement l'évolution de son statut. Elle s'abîme, se dégoûte, pour finir par douter de chaque instant vécu, même les plus doux.

VARIANTE

La rebound girl se laisse séduire lors d'une soirée trop alcoolisée par le charme abrupt de cet italien rencontré inopportunément, alors qu'elle passait une paisible soirée dans son bar préféré.
Elle voit bien qu'ils n'ont rien en commun. Mais l'alcool ou la gentillesse du jeune homme brouillent ses jugements et elle l'embrasse. Elle se demande depuis combien de temps l'envie avait quitté ses baisers.
Elle le retrouve quelques jours plus tard, sans grand enthousiasme d'abord. Puis à nouveau. Puis encore. Puis elle s'attache juste assez pour accepter de passer la nuit contre lui.
Elle pose la tête sur son torse et tend l'oreille à ses confidences. Peut-être est-ce la douceur de son regard à elle qui attire inévitablement l'abandon de ses interlocuteurs... Ou sa façon d'écouter.
Il fait défiler sa vie sur son smartphone et passe, gêné, les photos de cette fille dénudée, au visage quelconque et au corps parfait. Elle l'a quitté en octobre, après trois ans, il en est encore malheureux.
La rebound girl se cache sous les draps. Maladroitement, le gentil italien tente de la rassurer. "She's stupid. To have this body she threw up after eating... Can you imagine that ?? Stupid!!!"
La rebound girl éprouve une pointe de honte, une pointe de compassion, étouffe ce sentiment de jalousie qu'elle ne saurait souffrir, et tente de s'endormir quand ses songes répètent en boucle : danger, danger, danger.
Elle sait qu'elle devrait fuir et plus elle le sait, plus elle s'attache.
Plus tard, il lui dira qu'il faut qu'elle le comprenne, qu'il sort d'une histoire longue et douloureuse et qu'il ne peut rien envisager de sérieux avec elle. Et voilà, elle se trouvera bien idiote et souffrira enfin tout à fait.

La rebound girl n'a jamais assez confiance en elle pour partir, elle n'est jamais assez patiente pour attendre paisiblement l'évolution de son statut. Elle s'abîme, se dégoûte, pour finir par douter de chaque instant vécu, même les plus doux.


                                                                       Capture d'écran du film Gone with the wind, Victor Fleming, 1939, avec Vivien Leigh


L'une de mes meilleures amies, qui étudie la neuropsychologie à Paris Descartes, m'a toujours dit : les erreurs se suivent et se ressemblent. Depuis, je m'attache à en faire la démonstration chaque jour qui passe.



dimanche 21 avril 2013

Alors la vie à Bologne ?

Je vis en Italie depuis bientôt deux mois et j'ai pensé qu'il était temps que je vous raconte un peu...






J'adore vivre à l'étranger. Et les deux premiers mois sont souvent les plus exaltants ! J'aime par dessus tout cette sensation incroyable lorsqu'on se promène au hasard et qu'on est baigné dans une langue inconnue. Je raffole de ce brouhaha chantant qui me permet de m'évader sans qu'aucun mot, aucune parole prononcée autour de moi, n'arrête le cours de mes pensées. Au début, chaque quartier se présente comme un nouveau monde. J'observe, je range dans des cases, je détruis mes cases... Je perds mon temps en profitant de la vie.

À Bologne, en Émilie-Romagne, au Nord de l'Italie, j'étudie l'ingénierie. Je vis mon second Erasmus, avec moins de cours et plus d'emmerdes. Comme chacun le sait, on se fiche pas mal des études en Erasmus. J'aurais aussi bien pu étudier la littérature allemande ou l'élevage des tigres du Bengale. Ce qu'on apprend en vivant à l'étranger est cent fois moins "bankable" et un milliard de fois plus passionnant : On apprend qu'il existe d'autres vies, ailleurs. 

Le description que je vais vous faire est entièrement subjective. J'aimerais pouvoir lire le monde avec une grille plus large que la mienne mais malheureusement je n'ai pas ce super pouvoir ! Ainsi tout cela ne reflète QUE mon point de vue, en cet instant précis, qui est parfaitement partial et modulable. Certains s'y retrouveront, d'autres pas du tout ! N'hésitez pas à m’encenser/m'insulter en fonction ! (Je déconne) 


Bologne est la plus ancienne ville étudiante d'Europe, et ça se sent. Elle est vivante, dynamique, grouille de jeunes éphèbes, d'ados attardés et de hipsters en devenir. La Via Zamboni en est le parfait symbole. Des arches taguées, des places bruyantes et conviviales, de l'alcool à gogo... Ah et quelques policiers au coin de la rue ! À peu près tout ce qu'on attend d'un quartier étudiant. 


La ville marque d'abord par ses arches qui habillent chacune de ses façades. Il faut un certain temps pour apprivoiser Bologne et l'aimer complètement. Pour le rêveur, il est difficile au départ de vagabonder sans jamais voir le ciel. Puis on s'habitue, on remarque enfin l'harmonie des couleurs vives de ses ruelles et la douceur de son caractère presque médiéval. 

La première chose que ma coloc italienne m'ait dite : "Bologne, c'est la ville des 3T. Tours, Tortellinis et Tétés" ! 
Si les deux tours Garisenda et Asinelli, datant du XIIème siècle, en sont aujourd'hui le symbole, j'ai été plus interpellée par la Fontana del Nettuno. Cette fontaine, point de départ de nombreuses virées nocturnes, est plus que sensuelle et vous réserve quelques surprises.
Quant aux tortellinis... Mmmmmmmmmm... Bologne est vraiment LA ville de la bouffe. Pizza-Pasta-Fiesta !! Les lasagnes, les tagliatelles et les tortellinis sont un délice. Quand aux pizzas et aux piadines (sorte de sandwich avec de la pâte à pizza), on peut réellement en trouver à toute heure du jour et de la nuit, et même à des prix imbattables pour les étudiants (2,5e la Margarita chez Pizza Casa!!). Mais le plus surprenant pour un français ce sont... Les glaces. Elles sont absolument incomparables. La Gelateria Santo Stefano  est sans doute la meilleure de toutes et propose des parfums maison inoubliables comme pistache ou chocolat orange. C'est sûr, les italiens savent manger !

Bologne est aussi pleine de petits cafés extrêmement sympathiques. Mes préférés ? Fram Caffè via Rialto, à l'ambiance vintage et l'accueil chaleureux, et Camera a Sud plus au Nord pour son atmosphère très cosy, avec plein de bouquins et des petits biscuits qui accompagnent le thé. On peut même réviser ses exams tranquillement, il y a la wifi ! Le soir, rien ne vaut l'authenticité de l'osteria del sole, en plein centre, pour un bon verre de vin. En revanche, si vous voulez un aperitivo du tonnerre, c'est au Macondo, via del Pratello, qu'il faut se rendre ! On se régale aussi les oreilles puisqu'il y a un concert jazz en live tous les soirs à partir de 21h. Enfin, on peut enchaîner avec les shots fantastique du Piccolo&Sublime avant d'aller danser au Lord Lister.




Les surprises que vous réservent Bologne et/ou l'Italie :


Côté bouffe : Je vous l'ai dit, la nourriture à Bologne est incroyable. Mais parfois, vous risquez d'être surpris !! 


-> Le café : C'est une institution. Les bolognais en boivent non-stop, sans prendre le temps de s'asseoir, debout au comptoir. Et en effet, c'est vite avalé : l'expresso (ou ristretto) fait le quart de la taille d'un café français avec une force de goût inversement proportionnelle ! Si vous avez du mal et que vous commandez un "longo", vous obtiendrez alors ceci :



Je suis un café long... Si si !

Bref, si vous voulez un café long, demandez un Americano, si vous voulez beaucoup de lait, demandez un Latte Macchiato. 

-> Le chocolat chaud : Ce n'est pas une boisson, c'est un combo entrée-plat-dessert à lui tout seul. On dirait une crème au chocolat chaude... Vous n'aviez pas dîné ? Vous n'avez plus faim!


-> Le Spritz : ce cocktail orange est très répandu à Bologne. Il peut être préparé avec Aperol ou Campari. Un conseil si vous n'aimez pas trop l'amertume... Aperol !!! A Bologne, la coutume quand on trinque est de frapper son verre sur la table avant de boire. Sinon c'est 7 ans de malheur sexuel, à vos risques et périls !


-> Le limoncello : cette liqueur de citron se boit très très fraîche à la fin du repas. C'est sucré, c'est bon, ça passe très bien... Et c'est aussi très alcoolisé ! D'expérience, cela peut vous jouer quelques tours.


-> Le pain : Allez savoir pourquoi, dans le Nord de l'Italie, ils ont oublié le sel ! Ainsi, le pain ne se mange pas seul, mais toujours avec une sauce pour rehausser son goût.


-> La composition du repas : Sans doute le plus surprenant pour nous français... En Italie, on ne mélange pas pâtes et protéines ! Il y a le "primo", qui est généralement un plat de pâtes, et le "secondo" qui  vient après et peut être une viande, du poisson etc. Donc au restaurant, vous pouvez très bien commander de la viande et vous n'aurez aucun accompagnement ! Et il faut bien avouer que c'est assez perturbant de ne pas tout avoir dans son assiette en même temps... Mais c'est ainsi à Bologne, les féculents n'appellent pas forcément les protéines et vice versa !

-> Le service : Pas le temps de souffler ! A peine votre assiette ou votre verre est-il vide que les serveurs sont là pour débarrasser. On peut trouver cela un peu stressant (au Gusta Pizza à Florence j'ai même vu un jeune homme quitter la table toujours en mâchant) mais à Bologne vous pouvez rester tranquillement installé autant de temps que vous le souhaitez. 


-> Les aperitivos : Mais bord*l qu'est-ce qu'on attend pour implanter ça en France ? Ceux de Bologne ne sont pas aussi fournis que ceux de Milan, mais le concept est toujours très agréable. 

-> Les rayons des supermarchés : Attention frustration !! Pour les amoureux des yaourts, des fromages... Vous allez un peu morfler ;) Globalement en yaourt il n'y a RIEN. Enfin, rien comparé au choix français. Les rayons produits laitiers sont minuscules et les yaourts se vendent souvent à l'unité. Bon courage pour retrouver votre bon vieux fromage blanc ou votre faisselle. De même pour les fromages de chèvre et autres... J'espère que vous aimez le parmesan et la mozza' ! Pareille pour les amoureux de la compote, il va falloir vous mettre à la cuisine ! J'en oublie certainement plein d'autres mais pour éviter toute frustration rappelez-vous une chose : vous n'êtes pas en France. Ah ! Et n'oubliez pas : pour vous servir en fruits et légumes, mettez des gants en plastique. 


Côté mecs : Le parisien vous snobe littéralement sur le dancefloor, est un adepte du cynisme et vit sa propre attirance comme un aveu de faiblesse ? Le bolognais est au contraire un décomplexé de la drague qui vous colle gentiment et vous souffle des "che bella!" à l'oreille toute la soirée. Parfois c'est lourd, parfois c'est rafraîchissant. Si vous approchez votre main ne serait-ce que d'un micro-centimètre de votre porte-monnaie, il vous fait les gros yeux et prend cela pour une attaque frontale de sa virilité. Mais quand vous osez, après plusieurs spritz, un audacieux "on va chez toi ?" vous apprenez A COUP SÛR qu'à presque 30 ans, le mâle vit toujours chez papa-maman. Le choc. Si vous persistez, attention à la seconde onde de choc : le slip ! Non mesdemoiselles, le boxer n'a pas l'air d'avoir fait son chemin jusqu'en Italie. Et si malgré tout ça vous voulez poursuivre l'aventure, sachez que pour pouvoir dire d'un italien "le beau gosse là, c'est mon mec", il faut qu'il y ait eu une déclaration OFFICIELLE. Même s'il est adorable avec vous. Même si ça fait un mois qu'il dort chez vous un jour sur deux. Même s'il vous lèche les doigts de pied tous les matins. Même. Etre "insieme" en Italie, c'est pas de la blague. C'est limite bague au doigt et tutti quanti. D'ailleurs, un bon conseil si vous voulez faire fuir les relous en soirée : portez un bague. Annulaire droit ou gauche, peu importe. Quand un indésirable s'approche, levez la main et pointez votre bague. Radical.



Côté logement : Là ça devient franchement moins drôle. Si votre bellâtre habite toujours chez sa môman, ce n'est pas (forcément) parce qu'il est attardé complet et ne sait pas repasser ses chemises. C'est parce qu'en Italie les logement sont chers et que rares sont ceux qui ont les moyens de vivre seuls. En ce moment je suis en coloc' avec deux italiennes de 37 ans. Ouai. 37 ans. En coloc. 


Côté hygiène : Gros dépaysement aussi de ce côté là ! Vous voyez cet espèce de bidet à proximité de toutes les toilettes italiennes ? Ça s'appelle une douche deux jours sur trois. Eh non, les bolognais ne prennent pas une douche par jour, ils se rincent le derrière au bidet si nécessaire et puis basta ! Vous n'aviez pas remarqué la quantité incroyable de gel intime dans les rayons des hypers ? Quand à l'épilation, si vous êtes adeptes de la cire sans bande, emportez-là dans vos affaires, ici ça n'existe pas. Ni la mousse à raser féminine d'ailleurs. Crème dépilatoire puante pour tout le monde ;)

Et le reste ? 

-> La mode : N'est pas Milan qui veut et autant dire qu'à Bologne la mode n'est pas classée numéro une dans la liste des priorités. Regardez les chaussures, vous serez surpris... Pourtant les femmes soignent leur apparence et personne n'est gros ! Le régime pizzas-pâtes-glaces leur réussit plutôt bien, les chanceux. 

-> La cigarette : Dans les bars, de belles et beaux italiens avec des lunettes sans verre vous accosteront pour savoir si vous fumez. Si vous répondez oui, ils vous proposeront d'échanger votre paquet de cigarette contre un des leurs. C'est un moyen de faire de la pub pour les nouveaux paquets en contournant la loi !

-> Les vendeurs de babioles : A Bologne, les vendeurs de babioles kitsch (briquets en forme de wc, lunettes qui clignotent, peluches, bracelets de l'amitié...) s'invitent jusqu'à votre table dans les bars et les restaurants. Assez surprenant pour les parisiens qui voient les vendeurs de roses toujours rabroués à l'entrée des cafés... On s'agace de leur insistance au début puis on remarque que les italiens sont très aimables avec eux, discutent, leur font une blague, leur disent non poliment et ne semblent nullement importunés par leurs fréquentes irruptions. Que c'est agréable finalement un peu de bienveillance réciproque dans nos rapports, non ?

-> Les prises : incroyables. Je n'ai jamais vu une diversité pareille dans les formes de prises et pourtant vous n'arriverez jamais à brancher vos appareils ! Investissez dans des adaptateurs, en priant pour qu'ils concordent eux-mêmes avec les prises !!!

-> La religion : On la sent incroyablement plus présente qu'en France. Bon ok ça n'a rien à faire dans la partie "surprises", vous vous en doutiez. 


-> La politique : Voici ce que j'ai entendu le plus souvent à Bologne pendant les élections : "si Berlusconi passe encore une fois, je quitte ce pays de merde". C'est dit.

-> L'expression typiquement bolognaise : Sopa !! Qui vient très lointainement de "socchiare", sucer. Vous l'entendrez souvent, je ne suis pas certaine d'avoir encore bien cerné son sens...



Et voilà ! J'espère vous avoir fait faire un bon petit tour de ma ville d'adoption pour quelques mois. Je ne peux que vous inviter à venir passer quelques jours à Bologne -Ryanair et Easyjet sont sur le coup- la dolce vita n'est pas un mythe ! Et c'est tout près de Venise, Florence, et beaucoup d'autres villes plus touristiques mais dotées d'un charme incomparable. 


Tanti baci, a presto !!